Nous reproduisons ci-après un document de l’AFL 75, relatif aux risques soulevés par l’expérimentation du chèque énergie. Il apparaît que la généralisation de ce chèque peut poser d’importants problèmes: « d’après les informations communiquées par les fournisseurs «historiques» (EDF et Engie), il semble que moins de 50% d’entre eux l’aient utilisé. » Une information à mettre en regard des dispositifs d’automatisation du TPN et du TSS, qui atteignent désormais un nombre record d’ayants-droit.

L’expérimentation a lieu dans quatre départements :Ardèche, Aveyron, Côtes d’Armor et Pas-de-Calais. Dans ceux-ci, le chèque énergie se substitue aux tarifs sociaux de l’énergie, le TPN pour l’électricité et le TSS pour le gaz (individuel ou collectif).

L’AFL craint que le nouveau mécanisme fasse « perdre le bénéfice de l’aide financière à de nombreux consommateurs, pour plusieurs raisons :
– le TPN et le TSS étaient attribués aux personnes identifiées par les organismes d’assurance maladie (CPAM, RSI, MSA) ou l’administration fiscale selon un critère de revenus. Désormais, le chèque énergie est attribué aux ayants-droit uniquement sur la base de leur revenu imposable. S’il est obligatoire en France de déclarer ses revenus aux services fiscaux, même lorsqu’on n’est pas imposable, on ne peut ignorer le fait que de nombreux ménages ne font pas cette déclaration… Ils ne pourront donc pas être bénéficiaires du chèque énergie !

Le TPN et le TSS étaient automatiquement attribués, les ayant-droit recevaient un courrier leur annonçant qu’ils bénéficiaient de ce ou ces tarif(s), et leur indiquant qu’ils pouvaient manifester leur désaccord s’ils ne souhaitaient pas en bénéficier.

Aujourd’hui, le ministère de l’Environnement et de l’Energie envoie un chèque aux ayant-droit, à charge pour ceux-ci de le faire parvenir à leur fournisseur d’énergie pour qu’il vienne en déduction de leur facture.

Le ministère adresse également aux ayants-droit des attestations qui leur permettront, au cas où ils seraient par exemple menacés de coupure d’électricité, de justifier de leur statut de bénéficiaire du chèque énergie, et donc d’éviter la réduction de puissance à 3 kVA durant la trêve hivernale. Dans la pratique, les consommateurs ayant deux fournisseurs d’énergie pourront adresser le chèque à un premier fournisseur et l’attestation au deuxième. En revanche, il n’est pas utile d’adresser à un même fournisseur le chèque et l’attestation.

Malheureusement, les 173 000 ménages qui, en mai 2016, ont reçu un chèque énergie dans les 4 départements qui expérimentent cette nouvelle forme d’aide n’ont sans doute pas compris comment l’utiliser. D’après les informations communiquées par les fournisseurs «historiques» (EDF et Engie), il semble que moins de 50% d’entre eux l’aient utilisé, à l’heure où nous écrivons ces lignes.

La situation est encore pire pour les attestations :
– très peu de consommateurs ont compris qu’en renvoyant une telle attestation à leur fournisseur d’électricité, ils éviteraient la réduction de puissance prévue pour les ménages en situation d’impayé durant la trêve hivernale (sauf s’il ont déjà renvoyé leur chèque énergie à leur fournisseur d’électricité).

Rappelons que le chèque énergie permet de bénéficier des mêmes avantages que les tarifs sociaux de l’énergie : outre la non-réduction de puissance pendant la trêve hivernale, procédure adaptée de relance en cas d’impayés, réduction de 80% sur les frais d’interruption de fourniture en cas d’impayés, mise en service gratuite, absence de frais de rejet de paiement, et bientôt, pour les clients équipés d’un compteur Linky, mise à disposition sans frais d’un affichage déporté des consommations sur le lieu de vie.

Avec le TPN et le TSS, les fournisseurs d’énergie connaissaient les ménages qui bénéficiaient des protections liées aux tarifs sociaux. Avec le chèque énergie, conçu comme un titre de paiement, ils ne les connaissent plus, sauf si ceux-ci se manifestent en envoyant le chèque énergie ou l’attestation qui informera le fournisseur du statut d’ayant droit au chèque énergie, et donc des protections qui lui sont associées.

Ajoutons à cela que l’aide apportée dans le cadre du chèque énergie sera inférieure à ce qu’apportaient les tarifs sociaux, TPN et TSS, en raison du nombre plus important de bénéficiaires potentiels et des modalités de financement. Enfin, le TSS (gaz) collectif a disparu !

L’expérimentation engagée cette année sera bientôt généralisée dans toute la France. Les textes réglementaires prévoient qu’un rapport sera établi et présenté aux parlementaires, les AFL Paris ont fait adopter un amendement dans le cadre du Conseil Supérieur de l’Energie, qui prévoit que ce rapport sera communiqué à d’autres parties prenantes, et notamment aux associations de consommateurs. Cela devrait permettre de mettre en évidence les défauts du dispositif, et, nous l’espérons, d’en améliorer la mise en oeuvre. »