A Quimper, Atlan’Tech doit reprendre les salariés d’ODE affectés à la relève des compteurs…

Un récent arrêt de la cour d’appel de Rennes, qu’Energie2007 s’est procuré (cf. ci-dessous), vient d’imposer à un employeur ayant remporté un marché de relève de compteurs à reprendre le personnel de la société qui avait perdu le marché et ceci conformément à l’article L 1224-1 du Code du travail. Explications.

Il s’agit d’une affaire ayant opposé la société Atlan’Tech aux dix anciens salariés de la société Ouest control des eaux (ODE), laquelle a perdu, à la suite d’un appel d’offres, le marché de relevé des compteurs ERDF et GRDF en Cornouaille. Le société Atlan-Tech a été retenue pour le marché de prestation de service concernant « l’acquisition des index de consommation en électricité et gaz », c’est-à-dire le relevé des compteurs des consommateurs du Finistère, avec effet au 1er septembre dernier. Le 9 juillet, ODE a transmis à Atlan-Tech la liste des salariés attachés au marché concerné. En retour, le 22 juillet, Atlan’Tech a indiqué à ODE ne pas être contrainte par l’article L 1224-1 du Code du travail, refusant ainsi le transfert des contrats de travail des salariés concernés ainsi que la reprise du matériel (véhicules, téléphones…). Les salariés concernés ont alors saisi les prudhommes en référé. Une décision prud’homale du 28 août leur a donné raison, assortie d’une astreinte de 50 euros par personne et par jour à compter du 1er septembre.

Dans son jugement, la Cour d’appel de Rennes a estimé qu’il y avait lieu d’appliquer l’article L 1224-1 du Code du travail. « Si la perte d’un marché n’entraîne pas en elle-même (son application), il en est autrement lorsque l’exécution d’un marché de prestation de services par un nouveau titulaire s’accompagne du transfert d’une entité économique autonome constituée d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre et dont l’identité est maintenue ». La cour détaille ensuite les tâches affectées aux releveurs et l’organisation qui en découle pour montrer qu’il s’agit d’une « activité économique spécifique poursuivant un objectif propre ». Elle observe en outre que les salariés doivent disposer de « compétences spécifiques », se référant notalmment aux prescriptions de l’UTE C18-510 et aux « titres d’habilitation autorisant à (ces) salariés l’accès aux installations électriques ». Elle constate enfin que les salariés concernés ont été tour à tour employés par Cofathec, puis ODE et, à présent Atlan’Tech.
> Force ouvrière nous indique qu’ils étaient auparavant intérimaires pour le compte d’EDF GDF services Cornouaille, jusqu’à ce que le distributeur sous-traite la relève des compteurs, en 2001.

La Cour poursuit en démontrant que « l’activité de relève des compteurs EDF-GDF (sic), laquelle était détachable des autres activités de ODE, était assurée par des salariés qui y étaient spécifiquement affectés et dotés de compétences spécifiques ainsi que d’une organisation partuiculière constituant un service autonome ». Sans négliger que cette activité disposait « de moyens d’exploitation propres fournis en l’occurrence par l’entreprise ERDF GRDF (re-sic), à savoir leurs clefs permettant d’ouvrir les coffrets, les cadenas d’artillerie et, surtout, les TSP (terminal de saisie portable) confiés quotidiennement par le client à chacun des releveurs ». La Cour indique en conséquence que la société Atlan’Tech est obligée de « reprendre les contrats de travail des salariés de la société ODE affectés à cette activité ».
> On rappellera à la Cour que les compteurs électriques sont propriété des collectivités locales concédantes. Et qu’EDF-GDF n’existe plus… ERDF et GRDF sont des filiales distinctes d’EDF et GDF Suez.

La Cour d’appel de Rennes a donc confirmé le jugement en référé des prudhommes. Elle y a ajouté le paiement des frais de procédure, condamnant Atlan’Tech à verser 2.000 euros aux salariés, et des frais d’appel pour lesquels la société ODE recevra 1.500 euros.

Cliquez ici pour télécharger « l’arrêt Atlan’Tech » de la Cour d’appel de Rennes, en date du 3 décembre 2009.

> En pratique, les dix salariés avaient été déjà embauchés par Atlan’tech mais « ils étaient payés à ne rien faire, explique le syndicat FO qui a appuyé les salariés dans leur démarche. Leur employeur ne leur avait volontairement pas donné de travail ».

Dans un communiqué en date du 9 décembre, Force ouvrière s’est félicité de cette décision de justice, estimant que la Cour d’appel de Rennes « condamne le dumpin social ».