Dans un jugement rendu début octobre (ordonnance de référé du 1er octobre 2010 portée a la connaissance des parties le 4 octobre), le tribunal administratif de Nîmes a annulé la procédure d’appel à projets d’un conseil général au terme de laquelle la candidature d’EDF-énergies nouvelles avait été retenue. Cette décision fait suite à un recours de Fonroche, installeur et fabricant de panneaux solaires.

L’appel d’offres visait 200.000 m² de panneaux photovoltaïques, à installer d’ici 2014.

Dans un communiqué, le cabinet Huglo-Lepage, qui défendait Fonroche, se félicite d’une d’une décision « capitale pour l’avenir du solaire photovoltaïque en France et le rôle que joueront les collectivités locales ». Celles-ci, dans le prolongement du Grenelle 2, lancent en effet de nombreux appels d’offres pour équiper leurs bâtiments de panneaux solaires.

Que s’est-il passé?
En fait, le tribunal administratif a posé les conditions d’une concurrence loyale, laquelle n’a pas été respectée par EDF énergies nouvelles, dans le cadre d’une course à la montre destinée à remporter l’appel d’offres: « le Juge des référés a, tout d’abord, constaté qu’EDF énergies nouvelles France, avait tenté d’obtenir les autorisations d’urbanisme nécessaires à la réalisation de son projet d’installations solaires avant d’avoir été officiellement retenue par le Département auteur de la procédure d’appels à projets. Le Juge des référés a également constaté que cette opération avait pour but, pour EDF-EN, de tenter de conserver un avantage tarifaire à la veille de la baisse des tarifs d’achat intervenue à la suite de l’arrêté du 31 août 2010 ».

Traduction: en obtenant les autorisations nécessaires avant la publication de cet arrêté, EDF EN pouvait se prévaloir de meilleurs conditions tarifaires que ses concurrents… Ce que le juge a stigmatisé, « une telle pratique (étant) susceptible de léser les autres requérants qui, compte tenu de la baisse des tarifs ont dû procéder à des ajustements de leurs offres », précise le communiqué.

Pour sa défense, EDF EN a indiqué qu’il « était conforme à l’intérêt du conseil général comme (du sien) de tenter d’échapper, dans la mesure du possible, à la diminution à venir du tarif de l’électricité en déterminant, dès ce stade, le tarif applicable aux futures installations, dans l’hypothèse où son offre serait retenue ». L’ordonnance précise également que la société « a pris l’initiative de déposer, entre le 2 et le 6 août, autant de déclarations préalables que de sites retenus ». De son côté, la société Fonroche observe qu’elle « n’était pas informée de l’imminence de la baisse de tarif, contrairement à EDF et ERDF ».

Dans un « considérant », le tribunal a estimé que, dans la mesure où EDF-EN était, selon le conseil général, « en droit de présenter, dès avant la fin de la procédure ad hoc, des déclarations préalables pour l’équipement des sites en se prévalant de son autorisation, il devait, pour assurer le respect du principe de’égalité de traitement des candidats, informer tous les candidats de la possibilité qui leur était ainsi offerte, à un stade de la procédure permettant de présenter en temps utile des autorisations préalables ». En conséquence, la procédure est annulée, « non pas dans son intégralité, mais à compter de la date de remise des offres ».

A savoir
La baisse des tarifs de rachat de l’électricité d’origine photovoltaïque a été annoncée par un communiqué du Meeddm, le 23 août 2010. L’arrêté correspondant, daté du 31 août 2010, a été publié au Journal officiel, le 1er septembre.
Nous avons demandé copie du jugement afin de pouvoir le mettre en ligne, notamment pour pouvoir observer le calendrier des demandes d’autorisations qu’a condamné le juge.

Le calendrier est le suivant:
– mars 2010 – lancement de l’appel d’offres par le conseil général,
– 2-6 août: dépôt des demandes par EDF EN,
– 23 août: communiqué du Meeddm,
– 1er septembre: publication de l’arrêté du 31 août 2010,
– 17 septembre: Fonroche porte plainte.

—————-

Et aussi

Pour les juristes chevronnés, le cabinet Huglo-Lepage fait état d’une « première juridique » indiquant qu’un « contrat ayant pour objet non seulement de permettre l’occupation du domaine public en contrepartie du versement d’une redevance, mais également de prévoir l’exécution par le bénéficiaire de travaux d’installation de matériel photovoltaïque et de travaux d’entretien des toitures des bâtiments concernés, en contrepartie desquels le bénéficiaire se voit reconnaître le droit d’exploiter des équipement » peut faire l’objet d’un référé contractuel. Et, dans une verve lyrique qui l’honore, de préciser que « ouverture du champ d’application de la procédure de référé précontractuel est naturellement rendue possible par la nouvelle rédaction de l’article L. 551-1 du Code de justice administrative issue de l’ordonnance n°2009-515 du 7 mai 2009 ».

Crédit photo: Siega.

————–
Land rush: