Le tribunal administratif de Melun a décidé de transmettre au Conseil d’Etat une question prioritaire de constitutionnalité, visant la conformité à la Constitution de l’article 9 de l’ancien code minier, dans sa rédaction issue de la loi n° 99-245 du 30 mars 1999.

Dans cette attente, il est sursis à statuer sur la requête de la commune de Nonville et de la communauté de communes de Moret Seine-et-Loing, visant la société Zaza Energy (et Hess oil France, en fait qui aurait racheté le permis). Cette requête vise l’annulation d’une décision préfectorale du 26 octobre 2012, portant sur le rejet d’un recours gracieux demandé par les collectivités contre l’autorisation donnée à Zaza Energy d’effectuer un forage de recherche dit « Berceau 1: BCU-1. »

Les requérants considèrent que l’article 9 du code minier est contraire aux droits garantis par les articles 3 et 7 de la Charte de l’environnement. Or, l’arrêté du 10 août 2012 (autorisant le forage « de recherche d’hydrocarbures liquides ou gazeux », huiles et gaz de schiste), dit « permis de Nemours », est fondé sur ce fameux article 9.

Avocat des collectivités, Arnaud Gossement se félicite de cette transmission au Conseil d’Etat, « premier filtre », espérant que la QPC sera transmise ensuite au Conseil constitutionnel. La décision doit intervenir dans les trois mois.

« Si l’article 9 du code minier était annulé, la totalité des permis de recherche -abrogés ou non- délivrés jusqu’en 2012 seraient annulés. » Il précise également que le permis délivré est un « permis blanc concernant la recherche d’hydrocarbures » mais vise en fait « la fracturation hydraulique: même si ce n’est pas écrit dans le permis, on y parle de roche, de forage horizontal… Il s’agit évidemment de fracturation hydraulique, comme l’a d’ailleurs reconnu la Préfecture en avril 2013. Or, la loi Jacob précise qu’un permis de recherche doit être assorti d’un rapport indiquant qu’il n’y a pas de fracturation hydraulique prévue, ce qui n’a pas été fait. »

« C’est très encourageant, conclut-il, d’autant plus que nous avons fait face à une défense très ferme, qu’il s’agisse de la société Hess oil France ou de l’Etat, représenté par le Préfet, qui a demandé le rejet de notre demande au motif que l’article 9 ne pose pas de problème d’incompatibilité avec la Charte de l’environnement. »

Une QPC à suivre de près, au moment où le gouvernement rédige un projet de loi sur la réforme du code minier, qui pourrait être présenté à la rentrée.

Cliquez ici pour télécharger l’ordonnance de transmission de la QPC du Tribunal administratif de Melun.

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Le communiqué du cabinet Gossement avocats

« Gaz de schiste : première victoire pour la QPC déposée par les élus de Seine et Marne contre le Permis de Nemours

Par jugement rendu ce jour, le tribunal administratif de Melun a décidé de transmettre au Conseil d’Etat, la question prioritaire de constitutionnalité. Une première victoire.

Pour mémoire, la Commune de Nonville et la Communauté de communes Morêt-Seine-et-Loing ont déposé un recours contre la décision de la Préfète de Seine et Marne d’autoriser la réalisation d’un forage d’hydrocarbures non conventionnels. A l’appui de leur recours, les élus ont déposé une QPC.

Cette QPC doit permettre au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Charte de l’environnement des dispositions du code minier actuel (article 9), relatives à la procédure d’octroi des permis exclusifs de recherche.

Les requérantes contestent qu’un permis exclusif de recherches, revendiqué aujourd’hui par la société Hess Oil après reventes successives, ait pu être délivré, le 3 juin 2004, sans évaluation environnementale, sans information du public, sans information des élus locaux. Plus grave, la Préfète de Seine et Marne a reconnu que ce permis exclusif de recherches permet le recours à la fracturation hydraulique. Il aurait donc dû être abrogé à la suite de la loi du 13 juillet 2011.

Le Conseil d’Etat dispose désormais d’un délai de trois mois pour décider de la transmission de cette QPC. En cas de transmission, le Conseil constitutionnel dispose à son tour d’un délai de trois mois pour statuer.

Cette QPC est essentielle pour la rédaction en cours du projet de loi sur le code minier.

La Commune de Nonville, soutenue par la Communauté de communes Moret Seine et Loing est défendue par les cabinets Gossement avocats et DMD avocats. »

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Une autre QPC
Lire aussi notre actu du 26 juin 2013: « Fracturation constitutionnelle de schiste? » (Le rapporteur public du Conseil d’Etat a recommandé le renvoi devant le Conseil Constitutionnel de la loi Jacob, votée en juillet 2011, qui interdit la technologie de fracturation hydraulique sur le territoire français pour l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux. » Cette décision « fait suite à la question prioritaire de constitutionalité (QPC), déposée par la société américaine Schuepbach.)