Compte rendu de la Séance plénière « Sécurisation des réseaux face aux risques climatiques, où en est-on ? »

Concessionnaire et concédants : d’abord renouer les fils du dialogue
Les tempêtes de 1999 et de 2009 ont fait prendre conscience des faiblesses des réseaux publics de distribution d’électricité. Un rapport d’expertise, commandé par la FNCCR à Jean-Pierre HAUET, souligne le vieillissement de ces réseaux, conséquence d’une baisse notoire des investissements en termes d’entretien et de renouvellement.

Le rapport souligne la vulnérabilité des réseaux aux risques climatiques ainsi qu’une qualité inégale de l’électricité distribuée selon les territoires. Aussi, est-il préconisé en termes de sécurisation, notamment de traiter le réseau BT en remplaçant les fils nus et d’augmenter de manière significative le taux d’enfouissement du réseau HTA.

Par la voix de son président Michel Francony, ERDF, concessionnaire, a fait le bilan des dernières années. Il a fait observer que les investissements ont augmenté de 30 % en 3 ans, effort en partie annihilé du fait de la tempête Klaus de 2009. Même si les équipes d’intervention ont réalimenté les usagers deux fois plus rapidement qu’en 1999, toutefois les délais d’interruption d’électricité ont été, selon lui, encore beaucoup trop longs, générant colère et amertume des élus locaux et de leurs administrés.
ERDF se trouve ainsi aujourd’hui confronté à plusieurs défis :
– sécuriser davantage le réseau, notamment en enfouissant les lignes HTA. L’investissement consenti doit doubler entre 2005 et 2012 pour atteindre 3 milliards d’euros, et l’enfouissement des réseaux devrait passer de 3 000 à 6 000 kms par an sur 10 ans ;
– se préparer et répondre aux enjeux du futur, notamment le développement des énergies renouvelables (essentiellement éolien et photovoltaïque) et maîtriser la dépense énergétique ;
– améliorer la distribution au quotidien.

ERDF préconise la réalisation de schémas directeurs cohérents et partagés, qui intègreraient toutes ces dimensions et permettraient le rétablissement de bonnes relations et d’un dialogue constructif avec les autorités concédantes.

Philippe Ducène, conseiller général et président du Syndicat départemental d’énergies de la Dordogne appelle à un nécessaire rétablissement de la confiance entre les autorités concédantes et le concessionnaire, ce qui passe en premier lieu par le respect, par ce dernier, des cahiers des charges de concession signés localement. Il souligne les conséquences sociales et économiques des coupures d’électricité (175 mn par usager en 2008 en Dordogne contre 90 mn en moyenne nationale), et l’effondrement des montants consentis à la sécurisation des réseaux et en particulier aux élagages.
Même constat chez Frédérique Massat, députée, secrétaire générale du Syndicat départemental des collectivités électrifiées de l’Ariège. Dans son département fortement rural et montagneux, les temps de coupure atteignent des records (jusqu’à 9 heures), et les entreprises désignées par ERDF au lendemain des tempêtes de début 2009, afin de rétablir l’alimentation électrique, ne disposaient pas d’une connaissance suffisante du terrain et des réseaux sur lesquels elles étaient appelées à intervenir alors même que des entreprises locales compétentes étaient disponibles.

Pertes de moyens et d’efficacité, recentralisation du concessionnaire à une maille trop éloignée des acteurs locaux, manque de communication, non respect des engagements contractuels… le constat est sévère.

Comment faire pour aller plus vite et rattraper le retard pris sur la sécurisation des réseaux électriques, composante indispensable de la sécurisation des réseaux d’eau et d’assainissement ? questionne Charles Revet, sénateur de la Seine Maritime, président du Syndicat interdépartemental de l’eau Seine-Laval. Quelles sont les possibilités techniques et financières ? Quels moyens supplémentaires sont mobilisables ?

Bernard Vadon, président du SERCE (entreprises d’installation électrique), dresse le constat d’une baisse des investissements sur les réseaux entre 1992 et 2005, mais estime que les prévisions d’ERDF (une augmentation de 8 % des investissements entre 2008 et 2010) contribueront à plus de visibilité. Ses propositions : programmation des investissements, intervention dans le cadre de travaux sous tension, participation de la profession compétente à la maintenance des réseaux. Laurent Tardif, président du Sycabel (fabricants de câbles électriques) relève qu’environ 400 000 km de réseaux HTA restent à enterrer. La France présente un taux d’enfouissement d’environ 40 % mais pose également la question de la fiabilité dans le temps des câbles souterrains.

Pierre Franck Chevet, directeur général de l’énergie et du climat (MEEDDM), assure que le Gouvernement partage les préoccupations de sécurisation des réseaux exprimées par les acteurs locaux. En outre, tout en plaidant en une rationalisation des investissements, il énonce trois objectifs : l’environnement, la sécurité de l’approvisionnement et une maîtrise des coûts. Il a rappelé que les réseaux portent en effet les plans des énergies renouvelables (avec un objectif de 20 % en 2020), de la maîtrise de l’énergie, et des solidarités entre Etat (pour le développement des interconnexions au niveau européen).

En résumé, concessionnaire et concédants veulent aller aujourd’hui ensemble dans la même direction. Toutefois des divergences demeurent sur le niveau des objectifs à atteindre. Avec des défis de taille :
– retrouver la confiance, pour déterminer et réorienter les priorités ;
– se projeter dans l’avenir : les énergies renouvelables vont nécessiter des infrastructures complémentaires pour évacuer l’énergie, comme des investissements supplémentaires ;
– avoir davantage de lisibilité dans les investissements et une maîtrise des coûts.

En guise de conclusion, Xavier Pintat, sénateur de la Gironde, président de la FNCCR a rappelé en ces termes : « les collectivités perçoivent plus encore le prix de la non sécurisation des réseaux. Nous devons faire face à différents défis, mais il serait insupportable de vivre d’autres tempêtes dans les mêmes conditions, sans avoir porté les efforts sur les fils nus, l’enfouissement, l’élagage. La situation d’aujourd’hui est propice au partenariat, les bonnes volontés existent de part et d’autres. Il est nécessaire d’élaborer des schémas de sécurisation sous l’égide des autorités organisatrices, département par département, avec le concours des gestionnaires des réseaux concernés. »
A l’issue des échanges, deux motions ont été adoptées à l’unanimité, l’une portant sur la sécurisation des réseaux de distribution d’électricité, l’autre sur la qualité de l’électricité distribuée.

(avec la rédaction d’ENVISCOPE.FR)
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Présidée par Monsieur Xavier PINTAT, Sénateur de la Gironde, Président de la FNCCR
Intervention liminaire de Michel FRANCONY, Président du Directoire d’ERDF
Intervenants : Michel Francony, président d’ERDF ; Pierre-Franck Chevet, directeur général de l’énergie et du climat au MEEDDEM ; Philippe Ducène, président du syndicat départemental d’énergies de la Dordogne, vice-président de la FNCCR ; Frédérique Massat, député de l’Ariège, secrétaire générale du syndicat départemental des collectivités électrifiées de l’Ariège ; Charles Revet, sénateur de Seine-Maritime, président du syndicat interdépartemental de l’eau Seine-Aval, vice-président de la FNCCR ; Laurent Tardif, président du Sycabel ; Bernard Vadon, président du Serce.