La Cour des comptes a publié son rapport sur les certificats d’économies d’énergie, rapport assorti de « recommandations visant notamment à améliorer l’efficacité du dispositif, le simplifier, le rendre plus transparent et le mettre en cohérence avec les objectifs et les instruments de la politique d’efficacité énergétique. »
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Les conclusions et recommandations
« * Le modèle original de pilotage, effectué par la direction générale de l’énergie et du climat, l’ADEME et l’association technique, énergie, environnement, a fait preuve d’une certaine créativité qui mérite d’être saluée. Cependant, il manque de lisibilité, notamment dans les changements de périodes et ne permet pas aux acteurs d’anticiper les évolutions.
La création d’un comité de pilotage ouvert à tous les acteurs, et pas seulement aux spécialistes de l’énergie, pourrait assurer plus de dialogue et de transparence dans le fonctionnement du dispositif.
* La gestion matérielle des CEE, effectuée par le pôle national des certificats d’économies d’énergie, est d’une grande lourdeur. Appliquant strictement les textes en vigueur, il effectue des contrôles documentaires a priori qui permettent d’identifier erreurs et tentatives simples de fraude. Mais, absorbé par ces tâches matérielles répétitives, il a accumulé un retard important dans le traitement des demandes, et n’a pu mettre en place des contrôles approfondis a posteriori. Cette situation ne peut se poursuivre plus longtemps.
La direction générale de l’énergie et du climat doit donc dans les meilleurs délais définir un plan de contrôle et le mettre en oeuvre en dégageant les moyens nécessaires grâce à des simplifications de ses procédures :
– des mesures de simplification rapides sont nécessaires pour permettre au pôle national des certificats d’économies d’énergie de combler le retard dans le traitement des dossiers et alléger la charge de traitement administratif des obligés et éligibles. Elles doivent être prises dans les meilleurs délais ;
– au-delà, pour la troisième période, le dispositif devrait évoluer vers une autre logique fondée sur un système déclaratif dématérialisé et des contrôles a posteriori.
* Les obligés ont développé des stratégies diverses d’obtention des certificats
S’agissant des deux grands obligés, la proposition de « passeport énergétique » d’EDF et de GDF Suez mérite d’être approfondie et de retenir l’attention des pouvoirs publics à condition qu’elle ne « cannibalise » pas les financements directs des investissements et que les conditions d’expertise indépendante en soient garanties.
S’agissant des éligibles, les deux grandes catégories d’éligibles de la deuxième période ne jouent encore qu’un rôle très limité dans le dispositif :
Le potentiel des collectivités locales est encore très peu mobilisé au regard de leur faible part (2 %) dans les CEE attribués. Un certain nombre d’obstacles pourrait être levés pour améliorer ces performances : allongement des délais de dépôt des dossiers, abaissement de la taille minimale des dossiers pouvant être déposés, meilleure information des collectivités.
Le secteur de l’habitat social, comme les collectivités locales, s’est inscrit dans la logique des CEE, mais le potentiel d’actions reste certainement très important. L’entrée des sociétés d’économie mixte dans la liste des éligibles y contribuera.
* Enfin, le dispositif d’enregistrement et d’échange des CEE présente des risques de fraude ou d’irrégularités, qui doivent attirer l’attention des pouvoirs publics.
Si le registre EMMY est géré dans de bonnes conditions de productivité, de fiabilité et de coût relatif, on peut s’interroger sur le coût réel de la prestation au regard des moyens mobilisés par le prestataire et de la marge qu’il réalise.
Par ailleurs, les transactions effectuées sur le registre sont marquées par une absence de transparence sur les prix et par des transactions suspectes qui devraient provoquer une réaction des services concernés et une redéfinition des règles de fonctionnement.
Le redémarrage d’un marché assurant grâce à un carnet d’ordre une transparence des prix demandés et des volumes présentés sur le marché ainsi qu’une garantie des transactions apparait nécessaire au bon déroulement de la troisième période, qui devrait logiquement connaître un accroissement du montant des transactions.
À défaut d’une initiative privée de relance d’un marché de cotation, il est donc souhaitable que les pouvoirs publics reprennent ce dossier en séparant enregistrement et marché : le registre EMMY serait recentré sur l’inscription des acteurs et des certificats, tout élément relatif aux échanges étant réservé à une plateforme garantissant les conditions de transparence des transactions.
La Cour formule les recommandations suivantes :
6 – créer une instance de concertation réunissant tous les acteurs (administrations, représentants des obligés et des éligibles, association technique, énergie, environnement, autres associations), afin d’assurer un dialogue permanent entre les intervenants ;
7 – engager immédiatement et par sondage les contrôles a posteriori prévus par les textes et qui n’ont jamais été mis en oeuvre ;
8 – à court terme, mettre en place les simplifications nécessaires en termes notamment de standardisation des documents ; la direction générale de l’énergie et du climat (PNCEE) ayant déjà travaillé sur ce sujet, leur mise en oeuvre pourrait être rapide ;
9 – pour la troisième période, passer à une architecture différente fondée sur le triptyque dématérialisation/système déclaratif/contrôle a posteriori par échantillonnage ;
10 – développer le dispositif des « passeports énergétiques » sous forme d’un programme de CEE au sens de l’article L. 221-7 du code de l’énergie, afin de mieux cibler les logements visés et les travaux prioritaires, et accompagner la démarche des ménages ;
11 – renégocier les conditions de la délégation de service public pour la gestion du registre EMMY ;
12 – assurer la transparence et la sécurité des transactions, en séparant les fonctions d’enregistrement des certificats et la gestion des transactions, en assurant la visibilité de celles-ci (prix, quantités, effectivité des transactions). Si les volumes échangés le justifient, privilégier la relance d’un véritable marché. »