Dans un communiqué, le Comité de liaison des énergies renouvelables a rendu public un recours formé par Raphaël Claustre (son directeur agissant comme un « habitant de Paris ») à l’encontre de l’avenant n° 6 au traité de concession du 30 juillet 1955 pour la distribution de l’énergie électrique dans Paris, adopté par la Ville, le 15 décembre 2009. Ce recours en annulation fait suite à un recours gracieux (février 2010) de Raphaël Claustre, adressé à Bertrand Delanoë, maire (PS) de Paris. il a été déposé le 15 avril 2010, n’ayant pas reçu de « réponse à sa demande, et en accord avec le conseil d’administration du CLER dont il se trouve être le directeur ».

Cf. nos actus du:
– 15 décembre 2009: Paris: les concessions sont renouvelées,
– 22 décembre 2009: concession de la Ville de Paris, entretien avec Denis Baupin.

Ce recours vise à contester le « monopole quasi absolu d’EDF auprès des collectivités, sur la distribution et la fourniture d’électricité (qui) les empêche d’exercer un véritable contrôle démocratique des réseaux ». Dans son communiqué, le CLER déplore que « 93% des communes de France ne (puissent) ni contrôler, ni gérer pleinement leurs réseaux d’électricité. Seules échappent à cette règle imposée les 7% des communes qui, en 1946, avaient conservé leur gestion en régie et possèdent donc une entreprise locale de distribution (ELD) ». Cette absence de « contrôle démocratique », estime le plaignant, se traduit par l’impossibilité d’influer « sur le comportement d’ERDF, concessionnaire de leurs réseaux, dévoué aux objectifs stratégiques d’EDF dont elle est filiale à 100% », le CLER mettant en avant le financement, via les provisions pour renouvellement, d’opérations de développement international de la maison-mère. Le CLER souhaite que les collectivités puissent avoir la liberté « d’administrer comme elles le souhaitent leurs réseaux de distribution d’électricité, en créant une régie, une société d’économie mixte (SEM) ou encore en confiant la concession, éventuellement à ERDF-EDF, selon un cahier des charges qu’elles maitriseraient ». En outre, il plaide pour une véritable maîtrise, par les autorités concédantes, des choix d’investissements: « à travers les syndicats d’électricité ou d’énergie auxquels elles adhèrent, les communes sont sensées disposer des moyens juridiques et techniques de ce contrôle, mais l’expérience montre que cela ne fonctionne pas. Même lorsqu’une volonté politique s’exprime en ce sens, les choix d’investissements appartiennent à EDF qui a pris l’habitude de ne jamais rendre de comptes aux autorités concédantes ou à leurs représentants. C’est pourquoi d’importants syndicats ont été conduits ces dernières années à refuser d’approuver les comptes de leur concessionnaire imposé, EDF/ERDF ».

D’un point de vue juridique, le recours s’appuie sur la non conformité avec les « directives européennes de mise en concurrence des marchés publics (…) des conditions de passation des contrats de concession pour les réseaux de distribution d’électricité à EDF/ERDF ».

Le plaignant vise également le caractère anticonstitutionnel de la loi, indique La Gazette.fr: en « invoquant une «rupture d’égalité entre les 5% de citoyens pouvant exercer un contrôle démocratique sur leurs réseaux, à travers leurs entreprises locales de distribution (ELD) en charge de la concession du réseau de distribution d’électricité, et les 95% qui en sont privés», le concessionnaire ERDF leur étant imposé par la loi. Et c’est bien là le nœud du problème, car la Ville de Paris va répondre qu’elle n’avait pas le choix. D’ailleurs, le maire-adjoint de la capitale Denis Baupin, après avoir prôné une reprise en régie – comme sa ville l’a fait dans le domaine de l’eau –, avait reconnu que c’était impossible en raison de la loi de 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz ».

Pour Raphaël Claustre, il ne s’agit pas d’imposer une solution (régie ou autre) mais bien de « donner la responsabilité aux collectivités de déterminer la meilleure décision pour leur territoire ». Un recours à la cour de justice des communautés européennes aurait « conduit à situer l’action sur l’angle de la concurrence ». Le choix du tribunal administratif est aussi celui du service public.
Le CLER affiche son soutien à cette initiative non pas pour attaquer « une ville en particulier mais (…) pour que soit rendue aux collectivités compétentes la possibilité de s’organiser suivant l’intérêt de leurs territoires ».

A savoir
Le renouvellement des concessions va s’accélérer à compter de 2015, avec un pic au milieu des années 2020 (voir le calendrier du renouvellement des contrats de concession de distribution et fourniture d’électricité).