Verbatim du colloque « les smart grids, réseaux électriques du futur » organisé par la Commission de régulation de l’énergie et le Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières de l’Université Paris- Dauphine.
Curieusement, à l’issue des interventions et tables-rondes, aucun débat avec la salle n’est prévu.

Ronnie Belmans, professeur à l’université catholique de Leuven (Belgique) fait part de « nouveaux défis pour les réseaux électriques européens: évolution de la production, vieillissement des installations, ouverture des marchés et régulation, nouveaux modes de consommation…. » Or, le réseau actuel est « conçu comme un pipeline à sens unique » tandis que le réseau du futur sera, lui, « distribué ». Les défis pour 2020 sont multiples: émergence de fortes capacités de production solaire et éolienne (plus de 50 GWh dans le Nord de l’Europe, éolien offshore inclus), micro-production…
Depuis une vingtaine d’années, « les investissements dans les infrastructures laissent à désirer ». Conséquence: la hausse de la demande diminuera les marges de sécurité. Les smart grids pourraient contribuer à davantage d’équilibre.
Le réseau de demain « sera constitué de trois couches: l’infrastructure énergétique à base de cuivre, une couche de communication, une couche constituée de logiciels informatiques ».
Les smart grids devront être « acceptés par les consommateurs », notamment en répondant à leurs besoins (« facture plus efficace et rapide », domotique…). Les questions relatives à la vie privée ne doivent pas être négligées par les « décideurs politique » (caractère intrusif de la collecte de données, cyber-attaques…).
D’un point de vue pratique, il souligne que l’installation de compteurs intelligents suppose un personnel très qualifié.

Anh Vu, chef de projet smart grids (ERDF)

Véhicules électriques: ERDF s’interroge sur la capacité du système à accepter les charges liées à des besoins ponctuels massifs. Elle prend l’exemple des Parisiens partant tous en vacances en Lozère: les réseaux de Lozère ne supporteraient pas la hausse de la demande liées à l’arrivée de leurs véhicules qu’ils devraient recharger tous au même moment (la semaine précédente, Pierre-Yves Madignier évoquait les Alpes-Maritimes – ce qui semble plus plausible d’un point de vue touristique).
Etapes de développement des smarts grids: ERDF travaille sur des « démonstrateurs » avec quatre systèmes différents: intégration de  l’éolien, les réseaux urbains et ruraux, les quartiers solaires. « Dans ce dernier démonstrateur, on va tester le concept du micro-grid ».
« Nous allons aussi regarder l’acceptabilité des smart grids: quels sont les verrous sociétaux et environnementaux? J’accepte qu’on coupe on congélateur deux heurse dans la journée; en revanche, impossible de couper la télé si mon mari regarde le mondial de foot ».
« Tout ceci va coûter cher: recherche et déploiement, démonstrateurs, généralisation… » ERDF cherche des financements nationaux et européens (elle évoque ici « une initiative européeenne commune à plusieurs distributeurs et transporteurs », destinée à financer des démonstrateurs). « Tous les bénéficiaires devront mettre la main à la poche ».

Jean-Claude Lenoir, député de l’Orne

« Les opérateurs auront une meilleure connaissance des offres des fournisseurs et des besoins des consommateurs. Demain, le consommateur, aujourd’hui passif, deviendra un acteur qui se sentira responsable » du système électrique. Il cite l’exemple de ce qui est mis en oeuvre en Italie, par Enel.
Qui va payer? « Ce n’est pas le consommateur qui va payer. On ne va pas lui envoyer une facture parce qu’on lui a installé un compteur intelligent. Le financement se fera par le tarif. C’est une activité régulée ».

Pierre-Franck Chevet (DGEC, Meeddm)
Outre ses propos sur les réseaux de transport (interconnexions européennes, zones sombres en PACA et Bretagne), il parle « avant tout de la sécurisation des réseaux de distribution avec rigueur et obstination ».
« La vision: on a fait des économies d’énergie, donc on n’a plus besoin de réseau, c’est une vision qui ne marche pas (…). On fait son électricité à la maison, il n’y a plus besoin de réseau, ce n’est pas vrai ». Au contraire, les énergies renouvelables (avec leur intermittence), la maîtrise de la demande, notamment la gestion des pointes et leur bilan CO2, impliquent des « réseaux, des réseaux intelligents, et une consommation intelligente ».
Il se dit d’accord avec l’analyse des matches de foot: « on peut les enregistrer, mais ça perd un peu de sa saveur ».
Il souhaite « pousser le dossier des stations de pompage au niveau européen (car cela) permet de stocker de l’énergie lorsqu’elle est excédentaire et de la redistribuer de manière rapide lorsqu’on en a besoin ».
Linky: « il ne faut pas tarder, il faut le lancer au plus vite. Pour ceux qui ont de riches idées de compteurs beaucoup plus intelligents, je rappelle qu’il y au un principe de réalité et d’efficacité ».
Qui va payer? ‘Il y a de l’autofinancement, via le Turpe; s’il y a des besoins supplémentaires, ce qu’on ne souhaite pas, il y aura des financements collectifs ».

Dominique Maillard, président de RTE
« Il sera de plus en plus difficile de trouver de nouvelles possibilités de création de lignes aériennes; nous devrons apprendre à mieux utiliser les réseaux existants, d’où le rôle moteur des smart grids ».
Il met en garde contre les changements technologiques, estimant par exemple qu’il ne s’agit pas de changer de compteur tous les cinq ans: « il faut une certaine stabilité ».

François Moisan (Ademe)

Fonds démonstrateurs de l’Ademe: « On a reçu 21 projets (…). Globalement, toutes les fonctions sont prises en compte (…). Les projets sont en cours d’instruction ». Pour ceux qui n’ont pas eu le temps de répondre, l’appel à projets a été prolongé jusqu’au 31 mars ». Dans le Grand Emprunt, un volet smart grids est prévu, l’Ademe en étant l’opérateur.

Fabrizio Barbaso, direction générale énergie et transports de la Commission européenne: « il y aura 200 millions de compteurs intelligents en Europe en 2020 ».

Cliquez ici pour télécharger le dossier de presse de la CRE.
————–
Illustration: poteau pas très smart.