Les compteurs que prévoit de déployer ERDF sont-ils intelligents ? Pas beaucoup, répond Pierre Bivas, fondateur de Voltalis, qui dénonce « un grand programme » porté par des « ingénieurs (qui) parlent aux ingénieurs », sans vraiment se préoccuper du consommateur. Car ce dernier est noyé dans la masse d’un déploiement massif, pour lequel il sera fortement sollicité financièrement. Si l’investissement initial est aujourd’hui estimé entre 4 et 5 milliards d’euros, Pierre Bivas rappelle que Cap Gemini le voyait plutôt entre 5 et 7 milliards d’euros il y a un an. « Après le déploiement, il y aura le coût d’exploitation et celui de la maintenance. Les grands programmes sont réputés pour n’être pas très fiables », insiste-t-il, évoquant le « bug » de l’an 2000 qui fit frémir les banques. Déplorant aussi qu’avec l’essor de l’énergie photovoltaïque, « le fait que l’on puisse devenir producteur n’est pas prévu ». Au final, le coût sera « probablement le double de ce qui est annoncé, soit 10 milliards d’euros ». Et pour cela, en plein débat sur le pouvoir d’achat, « on vient de lancer une dépense semi-obligatoire, un quasi-impôt de plus de 400 euros TTC par foyer ».
Pourquoi un tel risque d’envolée des coûts? Derrière le compteur, il y a un système d’information. « Les promoteurs des compteurs évolués, ce sont les SSII, pas les fabricants de matériels électrique ». Le risque est grand, selon Pierre Bivas, que soit imposé un passage obligé « par le SI unique du GRD » avec, à la clef, un « marché figé jusqu’en 2017 » (date annoncée de la fin du programme), tuant toute possibilité d’innovation.
Car le principal problème vient des compteurs eux-mêmes : « ça fait 12 ans qu’on a déjà des compteurs électroniques, qui font à peu près la même chose que ceux qui sont annoncés ». En fait, il manque deux éléments essentiels : la télérelève ne se fait qu’en différé, rendant impossible des ajustements en temps réels, et il n’est pas possible de modifier la puissance à distance.

« Vous pouvez choisir le compteur que vous voulez, à condition qu’il soit de couleur bleu ciel. »
Or, ce qu’est en droit d’attendre le consommateur aujourd’hui, c’est « d’ajuster sa consommation en temps réel. Et ça ne concerne pas forcément tout le monde, en tout cas pas tout le monde en même temps ». Ce rôle-clef est celui des fournisseurs, pas du GRD. Un tel déploiement ne rendra « raisonnables » que les seules innovations concernant 10 ou 20 millions de clients. Or, interroge-t-il, « quel est le seul fournisseur qui a 10 millions de clients ? »
Pour Pierre Bivas, il importe aujourd’hui de mettre l’accent sur l’activation du port TIC des compteurs déjà installés. Pour cela, il suffit d’appuyer sur un bouton (« Ca prend un quart d’heure »). Quelque 15 millions de compteurs sont concernés. A 40 euros, l’intervention, le coût serait de 600 millions d’euros, réalisable en 2 ou 3 ans. « Ainsi, l’information produite par les GRD serait une information validée par tout le monde, puisqu’ion revient dans une logique de mesure, ce qui est le rôle du GRD ». Un tel dispositif ouvrirait la voie à diverses innovations, pouvant concerner quelques centaines de miliers d’utilisateurs. A l’image de la mombox (photo) de Voltalis qui permet l’effacement diffus et indolore pour réduire la consommation de pointe.