La FNCCR publie une lettre ouverte au Premier Ministre, relative à la réforme territoriale et à l’intercommunalité.
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« Monsieur le Premier Ministre,
Votre Gouvernement s’est engagé résolument dans une réforme d’ampleur, afin de doter la France d’une organisation territoriale plus lisible et garante d’une réelle efficacité dans l’utilisation des deniers publics. Qu’il s’agisse des projets de loi portés par l’Acte III de la décentralisation ou du futur projet de loi sur la transition énergétique, nous saluons l’ambition et le dessein des textes proposés.
Nous partageons la conviction que le « mille-feuilles territorial » doit être reconfiguré en supprimant les redondances des compétences des différentes strates administratives qui sont une cause de complexité et d’inefficacité.
Les grands syndicats intercommunaux ou mixtes de réseaux ont montré leur efficience
Il importe cependant de mener cette réforme avec prudence, en tenant compte de ce qui fonctionne déjà – et fonctionne bien ! – dans nos territoires, et d’enrichir les projets de loi en conséquence.
À ce titre, les syndicats intercommunaux ou mixtes de grande taille, spécialisés dans les services publics en réseaux (énergie, eau, communications électroniques, déchets), se sont avérés être de remarquables outils de rationalisation des services publics locaux et d’amélioration de leur efficience. En raison de leur emprise territoriale étendue et de leur spécialisation, les grands syndicats disposent de compétences techniques pointues, qu’une collectivité isolée, même de grande taille, ne peut facilement acquérir. Ils garantissent ainsi d’importantes économies d’échelle, permettant de concilier un bon niveau de prestations avec la maîtrise des coûts, au bénéfice de l’ensemble des usagers qu’ils soient professionnels ou simples particuliers.
Ils sont également porteurs d’innovations, dans des domaines tels que la production d’énergie renouvelable, la protection des ressources en eau ou la coordination de groupements de commande. Véritables bras armés de leurs collectivités ou EPCI membres, ce sont d’importants donneurs d’ordre, devenus indispensables à l’économie locale. Ils interviennent au plus près des citoyens, ayant la responsabilité de services publics vitaux, qu’ils délèguent à des opérateurs publics ou privés ou exercent directement, en régie.
Ils garantissent la solidarité et la complémentarité territoriales
Ce modèle est certes perfectible et, comme vous, nous sommes convaincus qu’il importe de rationaliser la coopération intercommunale. De fait, le modèle des syndicats est d’autant plus pertinent qu’il s’applique sur des territoires suffisamment vastes, en fonction des compétences et de la géographie, en confortant la solidarité territoriale sur laquelle repose sa légitimité.
Les territoires sont et demeureront en effet en situation de profonde inégalité, en raison des contraintes géographiques : les longueurs de réseaux de distribution d’énergie, d’eau ou de communications seront toujours beaucoup plus grandes dans les territoires ruraux qu’en milieu urbain. Les ressources en énergies renouvelables ou en eau se trouvent le plus souvent en rural, mais leur consommation est largement urbaine. Pour assurer la nécessaire solidarité entre ces différents types de territoires, il importe de mobiliser tous les outils, notamment les grands syndicats qui ont largement démontré leur efficacité dans ces différents domaines.
Nous proposons un calendrier de regroupement pour davantage d’efficacité et de lisibilité
C’est pourquoi nous soutenons le regroupement des services rattachés à des communes isolées ou à des petits syndicats intercommunaux afin de réduire le nombre excessif d’autorités organisatrices et d’en optimiser le fonctionnement. Ce mouvement est en cours : dans plus des deux tiers des départements, des syndicats intercommunaux ou mixtes d’énergie regroupent toutes les communes ou la très grande majorité d’entre elles ; il en va de même pour l’eau dans un quart des départements. Ce fructueux travail de regroupement doit être poursuivi, voire amplifié à l’échelon régional, dans les mois qui viennent. Nous sommes prêts à y travailler.
Pour y parvenir, un calendrier de rationalisation des services publics locaux doit être établi dans un cadre intercommunal approprié. Nous proposons qu’il soit défini conjointement par l’État et les élus locaux.
Attention à la « désoptimisation » territoriale
Enfin, nous appelons à ne pas confondre urgence et précipitation. Ainsi, nous nous inquiétons que le démantèlement des syndicats d’eau et le transfert de leurs compétences aux EPCI à fiscalité propre soit apparemment déjà mis en œuvre par certains préfets, sans que la moindre étude d’impact ne soit réalisée préalablement afin d’évaluer les conséquences d’un tel transfert (multiplication des contrats de vente d’eau en gros entre les collectivités, source de complexité administrative supplémentaire, incidence sur le prix de l’eau, impact financier du transfert d’usines de production importantes qui alimentent un territoire souvent non superposable aux limites administratives…). Cette approche engendre déjà de vives contestations au niveau local – alors que le dialogue serait nécessaire.
Nous sommes ouverts à la concertation dès à présent
Un travail de concertation préalable à la décision s’impose, d’autant plus que l’État, comme les élus locaux que nous sommes, partagent une même ambition de services publics performants, novateurs et économiquement soutenables. »
Les premiers signataires :
– Xavier Pintat, Sénateur, président du Syndicat départemental d’électricité de la Gironde, président de la FNCCR;
– Guy Hourcabie, président du Syndicat intercommunal d’énergies, d’équipement et d’environnement de la Nièvre, premier Vice-président délégué de la FNCCR;
– Denise Saint-Pé, présidente du Syndicat d’énergie des Pyrénées-Atlantique, deuxième Vice-présidente déléguée de la FNCCR
– Jean Besson, Sénateur, président du Syndicat départemental d’énergies de la Drôme;
– Charles de Courson, Député, membre du Bureau du Syndicat intercommunal d’énergies de la Marne;
– Michel Doublet, Sénateur, président du Syndicat des eaux de Charente-Maritime;
– François Fortassin, Sénateur, président du Syndicat départemental d’électricité des Hautes-Pyrénées;
– Bernard Fournier, Sénateur de la Loire, président du Syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire;
– Jean-Jacques Guillet, Député, président du Syndicat Intercommunal pour le gaz et l’électricité en Ile-de-France;
– Charles de La Verpillière, Député, président du Syndicat intercommunal d’énergie et de e-communication de l’Ain;
– Daniel Laurent, Sénateur de Charente-Martitime, président du Syndicat départemental d’électrification et d’équipement rural de la Charente-Martime;
– Alain Le Boeuf, Député, président du Syndicat départemental d’énergie de la Vendée;
– Viviane Le Dissez, Députée, vice-présidente du Syndicat d’énergie des Côtes d’Armor;
– Frédérique Massat, Députée de l’Ariège;
– Jean-Claude Merceron, Sénateur;
– Ladislas Poniatowski, Sénateur, président du Syndicat intercommunal de l’électricité et du Gaz de l’Eure;
– Jean-Claude Requier, Sénateur, président de la Fédération départementale d’énergies du Lot;
– Charles Revet, Sénateur, président du Syndicat départemental de l’eau Seine Aval;
– André Santini, Ancien Ministre, Député, Président du Syndicat des eaux d’Ile-de-France.
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> Vous pouvez également signer cette lettre en ligne sur le site de la FNCCR.